Ce matin, 8h10, nous sommes tous prêts à quitter la maison – pour une fois sans se presser et sans stress – ce qui est loin d'être le cas tous les jours…
Grande-Miss est déjà partie au lycée, puisqu'elle commence à 8h.
Mr Chéri, Super-Boubou et moi-même sommes à la porte pour faire une partie du chemin ensemble pour déposer Super-Boubou à l'école primaire.
Je tiens tendrement dans la mienne la main de Super-Boubou, Mr Chéri marche à nos côtés…
Nous parlons tranquillement de la journée à venir, du fait qu'il faudra bien travailler à l'école, et puis aussi penser à s'amuser avec les copains.
Nous passons devant le collège où Mr Chéri travaille…
Certains collégiens, arrivés par le bus, sont déjà là depuis quelques minutes…
Les filles d'un côté du trottoir, s'embrassant pour se dire bonjour, riant, gloussant et monopolisant – sans gêne aucune – une bonne partie du trottoir et empêchant de fait les mamans avec les poussettes de passer facilement…
Les garçons de l'autre côté du trottoir, à s'interpeler bruyamment, se bousculer légèrement, se titiller, mine de rien…
Tout à coup, j'observe du coin de l'œil gauche, un petit rassemblement de garçons…
Je continue à parler à Super-Boubou et Mr Chéri, tout en continuant à regarder…
Chacun vaque à ses occupations…
Et tout à coup, j'aperçois un des garçons au sol, assis par terre avec son sac sur le dos…
Et tout autour de lui 4-5 autres garçons en train de lui mettre des coups de pieds…
Je n'ai pas réfléchi, pour moi, c'est sorti tout seul…
"Hé, hé, les jeunes, ça ne va pas non !".
Le temps s'est arrêté, les regards se sont tournés vers moi, puis vers le petit attroupement, qui a commencé à se disperser en se dirigeant vers l'entrée du collège…
Mr Chéri a traversé précipitamment la rue, a poursuivi le petit groupe, et en a reconnu deux… qu'il a fait entrer dans le collège demandant à l'agent d'accueil de prévenir soit le chef d'établissement, soit l'adjoint, soit un CPE ou encore un surveillant… car personne à presque 8h15 n'était encore présent à la grille pour surveiller – mine de rien – les collégiens…
J'ai attendu avec Super-Boubou, Mr Chéri, qui est revenu vers nous…
- "Alors qu'ont-ils dit ???".
- "Ils ont dit que ce n'était pas grave… que c'était un jeu !".
- "Mais merde !!! Ce n'est pas un jeu… Se faire taper dessus – même s'ils pensent que c'est pour rigoler – ce n'est pas un jeu… Et si cela avait été leur petit frère… ou leur petite sœur… ou mon fils… auraient-ils également pensé que c'était un jeu ??? Comment auraient-ils réagi ? en laissant faire pour rigoler ? ou en intervenant ? Et maintenant que va-t'il se passer pour eux ?".
Bien sûr, je n'avais pas le temps d'aller leur expliquer, que cette violence "ordinaire" n'est pas un jeu…
Que chaque coup porté, est un coup porté à l'estime que l'on a de soi…
Que cela peut nous atteindre beaucoup plus que la violence des coups…
J'ai donc continué mon chemin et laissé Super-Boubou et son papa au seuil de l'école primaire, puis je suis allée prendre mon RER pour aller travailler…
Quand je suis arrivée sur Paris, j'ai pris mon tél. portable pour demander à Mr Chéri, ce qui s'était passé pour les gamins.
Il m'a répondu qu'il ne savait pas… que pour les CPE et l'adjointe cela faisait partie de leur quotidien…
Mais, même si tel est le cas, il me semble pourtant qu'il soit bon de répéter encore et encore que la violence n'est pas une forme d'expression, et que jouer à se taper n'a rien d'ordinaire, de banal, ni de normal…
Ce matin, je suis intervenue et Mr Chéri a suivi…
Et je suis contente de l'avoir fait…
Parce que ce petit garçon assis par terre, à recevoir des coups de pieds – pour jouer - cela aurait pu être mon fils ou ma fille…
Et que pour moi, cette violence "ordinaire"… ce n'est pas un jeu !